Avouons le, une fois de plus les pronostics européens ont été infirmés par les électeurs américains. Même si Hillary Clinton a rallié plus de 2millions de voix de plus, Donald Trump l'a emporté porté par une vague de contestation populaire qui apporte en plus de son succès une majorité à la chambre des représentants et du Sénat. Carte blanche à celui qui a réussi à tenir en échec l'establishment avec á la base des thèmes portant sur la sécurité, l'immigration et le refus du déclassement social des classes moyennes. C'est aussi et surtout le manque d'adhésion à la campagne démocrate qui au final met un terme à la dynastie Clinton. Bref, les grands électeurs début décembre s'apprêtent à confirmer l'élection d'un homme d'affaires milliardaire sans réelles expériences d'un quelconque pouvoir politique et en particulier d'une expérience des relations internationales dans en monde de plus en plus risqué et dangereux.
Et une rumeur sourde, celle d'un nouveau président qui est mandaté pour jouer à chamboule tout dans l'univers feutré de la maison blanche : Sur le plan intérieur, l'application de sa politique économique consisterait à accroître les investissements publics d'infrastructures, renforcer le budget de la police et de l'armée et d'adopter une posture protectionniste. Sur le plan extérieur, il s'agirait de revoir les traités bilatéraux en particulier vis à vis de l'OTAN, de faire payer les pays pour leur sécurité et revoir le modus operandi des relations avec la Russie et la Chine.
Trump initierait une relance keynésienne en même temps qu'il réduirait les prélèvements obligatoires!! On se rappelle l'expérience de Reagan appuyée par la célèbre courbe de Laffer qui visait à justifier un déficit opérationnelle vite que son théoricien estimée être à très court terme comblée par des rentrées d'impôts issues de la relance de l'activité ; on se rappelle le réarmement du Pentagone et ses initiatives pour construire un bouclier anti missiles. Résultat, Il a fallu dix ans et la loi Graham Rudman pour imposer un retour à l'équilibre budgétaire. Il fallu aussi s'en remettre aux évidences et accepter que l'activité ne se rétablissait pas aussi aisément. Il a fallu dans la foulée solutionner la première crise immobilière en 1990, recapitaliser les savings and loans, fusionner un grand nombre d'établissements bancaires et assainir une première fois le marché des High Yield(remember Milken). Dans le cas présent, pour relancer les,programmes d'infrastructures il faudra l'aval du congrès car pour cela il faudra admettre un déficit plus important et relever sur cinq ans le plafond d'endettement de l'état. Il faudra aussi associer à cette manœuvre la FED, qui ne manquerait pas de remonter plus fortement ses taux directeurs en réponse à la remontée de l'inflation de fait de l'inertie de la croissance potentielle actuelle. En un sens, d'ailleurs, si les autorités budgétaires et monétaires s'entendaient sur un plan quinquennal des dépenses d'infrastructures ce serait parfait. À charge d'accroître le montant du déficit public et de faire reconnaître l'intérêt d'un déficit structurel provenant des investissements publics à long terme. Nous n'en sommes pas encore la, sans une initiative mondiale incluant l'Europe et l'Asie aurait même du sens. Assurément le chemin sera dur d'ici la.
Sur le plan des relations internationales, Trump pourrait faire l'expérience des conséquences sur le terrain de son manque d'expérience.En particulier vis à vis de la Russie mais aussi de la Chine. On se souvient de l'impact de la perception de Kroutchev de Kennedy en 61 á Vienne et des suites terribles qui s'en suivirent avec le mur de Berlin et la crise des missiles. Si l'histoire se répétait l'Europe aurait franchement beaucoup à perdre et la Russie pourrait bénéficier d' effets d'aubaines en Europe de l'Est et au Moyen Orient. Á suivre. Gageons que le département d'état saura faire face et maintenir une politique ferme vis à vis de Moscou, sans jouer au gros bras. Il serait souhaitable aussi que l'Europe prenne des initiatives dans ce sens.Car à laisser passer les trains, elle va finir par subir de nouveau l'anarchie de ses populismes.
Au delà de ces deux commentaires, Trump n'est pas Reagan, ni Kennedy... Coté économie, Il n'interviendra pas dans le même environnement, et avec des moyens nécessairement plus limités dus à l'impasse budgétaire annuelle, levée avec parcimonie par le Congrès deux fois par an. A suivre. Coté diplomatie, la récente nomination du nouveau secrétaire d'Etat aux affaires internationales nous laisse supposer un biais pétrolier cher aux républicains depuis les 20 dernières années.
Trump illustre la somme de toutes nos peurs; l'inexpérience du pouvoir; son coté imprévisible et sa volonté d'emporter toute joute...nous verrons jusqu'ou le mènera son "esprit d'escalier" et son narcissisme maladif. Il aura face à lui l'ensemble de l'establishment fédéral, qui ne lachera rien sur le fond. Il y aura les grandes puissances, et leur capacité à financer ou pas sa politique à travers les adjudications d'emprunts américains. Et finalement, l'opinion publique qui pourrait plus rapidement que prévu, sans frais à ce stade, des limites de son choix collectif.
Quatre années s'ouvrent à nous avec sans aucun doute beaucoup à faire chez chacun d'entre nous (Europe, Russie, Chine et autres grandes Nations) pour mettre nos maisons en ordre face à des Etats Unis, qui se veulent plus repliés sur eux-mêmes, sans forcément avoir les moyens de sa politique. Rappelons que ce sont les précédents gouvernements républicains qui ont radicalement déstabilisés les grands équilibres mondiaux depuis les années 90. Puisse l'Europe reprendre ses esprits et combinés les bonnes volontés des gouvernants restés en action pour façonner une organisation plus stable et pérenne, pour notre sécurité et notre vitalité, en laissant bien d'autres se mesurer aux délires outre-atlantiques.
Jean- Christophe Cotta
Allocation & Sélection
Achevé de rédiger mi novembre 2016
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