Ne revenons pas trop sur le coup d’Etat. Mais comme au début de la cinquième, le régime des partis a capitulé face aux difficultés du moment, la décolonisation et l’entrée en Europe en 58, la crise économique, sociale et territoriale et l’impasse européenne aujourd’hui. D’un coup et d’un seul, le personnel politique a entamé un grand ménage de printemps, révolution culturelle à la française, qui a vu entrer à l’Assemblée Nationale, à parité, des hommes et des femmes souvent issus de la société civile; et les partis politiques traditionnelles sont restés sur leur ère, éffarés, avec un souci criant sur de leurs effectifs, et la qualité de leurs message. Bref, comme au début de la cinquième, il ne restait plus au pouvoir en place qu'à rassembler le peuple français sur son programme et moderniser la France afin qu’elle entre dans le 21e siècle et conforte le projet européen communautaire. Et comme par le passé, une grande majorité des français a donné quitus, cette fois ci, à Macron, son équipe et ses soutiens pour changer la France avec intelligence et mesure en appliquant un programme ambitieux mais réaliste
Pourtant, à la fin du mois d’Aout, après quinze mois d’exercice, le début de la nouvelle saison s’affiche plus incertain, et disant le, plus inquiétant, aux premiers abords. La reprise n’est pas là. La croissance économique française ralentit plus que prévue, l'inflation remonte, le déficit public remonte de nouveau. Et, pour ceux encore intéressé par l'information quotidienne en boucle, émerge de nos médias un roman de nouveau propre à la France qui perd, fait de revendications catégorielles, inter-générationelles, et identitaires, grands marronniers de tous les lobbies qui aiment à ne point se faire oublier, surtout quand le Président de la République leurs intime l'ordre de venir le chercher... Nous pouvons donc nous attendre à un automne assez désespérant (et pas que Billancourt). Surtout, que la principale réforme de fonds de tout son dispositif n’est pas encore entamée ; la baisse des dépenses publiques, la réduction de la pression fiscale et la relance de l'investissement et de l’emploi ; de plus les classes moyennes ont de nouveau connu une nouvelle ponction fiscale et de pouvoir d'achat, même si nous sommes au milieu du gué, concernant la baisse des cotisations sociales et la hausse de la CSG, .
Reste le souci central du dispositif de réforme et de relance, on ne raye pas 80 milliards d’euros de dépenses publiques d’un trait de plume, et quatre ans ne seront sans doute pas du luxe pour aboutir. Il ne fait aucun doute que l’exécutif tablait sur la reprise de la croissance pour réduire l’ardoise en terme d’ajustement humain et budgétaire. Il est plus surprenant que la méthode employée sur l'année pour aboutir ait consisté à mettre dos à dos les mécontentements catégoriels pour aboutir à une avancée : les retraités, les chômeurs, les cheminots, les transporteurs aériens... Il est pathétique de constater que les membres de l’opposition aient rétabli leurs vieilles postures médiatiques (qui leur a justifiées d’être congédiés, en s'opposant officiellement tout en étant d'accord sur le fonds), afin d’illustrer plus leur désaccord, plutôt que les pistes éventuelles de progression (sont ils à ce point désorientées). Il est étonnant, enfin, que l’exécutif semble hésiter sur un grand nombre de sujets ((réformes des institutions, aménagements du territoire, traitement des banlieues, fiscalité des successions, exit tax,...). et n’en appelle pas à une solution d’unité nationale à travers une planification sur quatre ans des grandes réformes structurelles d'ensemble. Au moins, et avant tout, il faudrait qu'il fasse preuve d'un peu de pédagogie. Et, qu'il explique sérieusement que les réformes structurelles sont susceptibles d’engager une baisse de la croissance à court terme, et que les efforts de tous sont nécessaires pour inverser dans la durée quarante ans de déficit public pour le bien de nos générations futures, et de nos retraites aussi. En cela d’ailleurs, les six minutes de l’interview de Nicolas Hulot de Léa Salamé et Hervé de Morand devrait fait l’objet d’une étude de texte sérieuse. En particulier, sur la gestion du court terme (matérialisme et aliénation consumériste), l’absence de relai au sein de la société civile, l’absence de soutien au sein des grands ministères, les pratiques des lobbies (dont certains se décrivent comme des mercenaires) et autres joyeusetés enrichissantes pour un petit nombre, mais nuisibles pour la plupart.
Pour ma part, optimiste de naissance, je n'envisage pas l’enlisement. Je parierai plus sur un trou d’air passager mais utile de la stratégie présidentielle. Première difficulté : Il va lui falloir expliquer à tous (peut être aussi aux journalistes, qui calent leur vente sur l’exploitation de la peur du plus grand nombre) que le niveau de croissance actuel a été anormalement élevé cette année, que son niveau potentiel se situe autour de 1,2% à 1,4% (compte tenu de la faiblesse des investissements publics et privés et aussi de la modération de la consommation de masse) et que les efforts demandés seront d’autant plus couteuse que tardive et à contre cycle (3% de PIB sur quatre ans, et 0,2% à 0,4% de croissance en moins). Deuxième difficulté : il va lui falloir entamer la réduction plus rapide des effectifs de la fonction publique, et la réaffectation d’agents dans les ministères régaliens, puis aboutir une meilleure organisation des aides publiques centrales et locales auprès de nos populations les plus en danger. Troisième difficulté : établir un vrai débat sur l’Europe, ses enjeux, ses limites et surtout, les principales directions que les Français sont prêts à emprunter. L’opposition s’est ridiculisée en annonçant à gauche la transformation de l’élection d’avril prochain en plébiscite de la politique mise en place par Macron.
Reste la permanence du coup d’Etat... Si l’on rapproche les deux prises de pouvoirs de 1958 et 2017, il serait utile de s’interroger sur le (ou les) grands lâchages que pourrait décider le Président MACRON, dans le secret de son bureau. Si l’on va au bout de sa logique économique et sociale "remettre le travail à l’honneur", et pour reprendre un concept galvaudée depuis les années 30, « la mort du rentier » pourrait être programmée ; à l’instar de la fin du statut de fonctionnaire pour les cheminots un alourdissement des droits de succession n’est pas à exclure, mais aussi pourquoi pas une hausse des impôts fonciers, une prise en compte de la valeur locative des résidences principales, une taxation des résidences secondaires, sans oublier un alourdissement de la CSG/ CRDS sur les plus values de cession. OU pourquoi pas, et cela serait sans doute socialement plus juste la suppression de l’IRPP (que les plus riches ne paient plus) et la mise en place d’un impôt sur le capital déclaratif de 3% ou plus, opposable aux tiers et à l’administration, comme le suggérait dans les années 70 Maurice Allais, l’un de nos trois Nobel d’économie. Concernant la mise en conformité de la France dans l’Europe, il pourrait aussi faire table rase de l’organisation des collectivités locales, et de ses échelons administratifs. Moins de régions encore, une approche plus décentralisée..., une nouvelle dénomination et la mise en place de politique différenciée dépendante de la localisation géographique, à charge pour lui de constituer des ensembles diversifiés dans lesquelles figure le littoral, le centre de la France et les régions frontalières, la région Ile de France exceptée. Aucun responsable politique n’a été jusqu’au bout, tant il paraît que la désorganisation pourrait être grande, surtout pour les édiles politiques locales.
Bref, il s’agit de transformer une situation subie en planification d’un changement voulu. Tout un programme !!!
Jean-Christophe Cotta
Allocation & Sélection
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